Alors que d'immondes pirates mettent en danger notre sacro-saint petit écran à coup de téléchargements illégaux, un homme, un surhomme que dis-je, se dresse seul pour défendre la ménagère de moins de quarante ans et les CSP+. Ce héros se nomme: El programator.
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dimanche 15 mars 2020

Baron Noir

J'ai rarement l'occasion de parler de série française sur ce blog, et je le regrette, mais en cette période très particulière d'élection municipale je tenais absolument à vous parler de Baron noir et surtout à vous rappeler d'aller voter.



Diffusion : saison 1 sur Canal Plus en février 2016, saison 2 en janvier 2018 et saison 3 en février 2020
Durée : 52min
Genre : Drame, Thriller, politique
Réalisation :Eric Benzekri, Jean-Baptiste Delafon
Casting : Kad Merad, Anna Mouglalis, Hugo Becker, François Morel
Nationalité : France

Synopsis :

Député maire du nord, Philippe Rickwaert est un farouche partisan de la gauche prêt à tout pour défendre les valeurs sociales. Entre la droite, le centre et les extrêmes, il devra user de tout son talent dans l'espoir un jour d'accéder à la fonction suprême.

Critique :

Baron Noir est arrivé en France 3 ans après House of cards, autant vous dire que la comparaison a fait beaucoup de mal à l'outsider Français. Les moyens ne sont pas les mêmes et pourtant on sent que Canal + n'a pas hésité à mettre les petits plats dans les grands pour cette série ambitieuse. Il n'y avait qu'a regarder le casting pour s'en convaincre, certes Kad Merad n'est pas Kevin Spacey (et en même temps, tant mieux, il n'est pas impliqué dans des affaires d'agression sexuelle) mais il n'en reste pas moins un acteur ultra bankable grâce au succès populaire en 2008 de Bienvenu chez les chti mais surtout critique en 2006 de Je vais bien ne t'en fait pas (un drame magnifique à voir absolument). A ses côtés Niels Arestrup acteur moins connu mais jouissant d'une véritable aura grâce à une longue carrière et des collaborations réussis avec Jacques Audiard (De battre mon cœur s'est arrêté, un prophète, etc) apportait le sérieux qui aurait pu manquer à Merad mais surtout la présence de Anna Mouglalis à la carrure internationale (Romanzo Criminale, Coco Channel & Igor Stravinski, etc) finissait de conférer au projet la modernité nécessaire à ce que l'ensemble prenne forme. De mémoire, le seul véritable défaut des premières saison était d'avoir sous exploité Mouglalis en la noyant dans une romance un peu convenu (la jeune et belle femme amoureuse du vieux beau...). J'imagine que c'était une facilité d'écriture qui garantissait une certaine audience mais ça n'en restait pas moins agaçant, pour moi en tout cas. Avec cette troisième saison l'erreur est réparée, Anna Mouglalis y est remarquable et c'est à mes yeux un sans faute.
Depuis le premier épisode, Baron noir a su coller au mieux à l'actualité politique et sociale Française. Ainsi, si la saison 1 se concentrait sur les présidentielles et les financements de campagnes illégaux, la saison 2 s'intéressait à la mise en place de la politique du nouveau président mais surtout à l'arrivé du terrorisme. Sans trop de surprise, la saison 3 se concentre donc à nouveau sur les présidentielles et surtout la montée de l'anti-système.
Ainsi, Vidal, remarquable François Morel dans le rôle de Melenchon, monte sur le devant de la scène avec son mouvement Debout le peuple (copier coller de la France Insoumise) et arrive dans l'équation un certain Mercier que les plus politisé reconnaîtront être Etienne Chouard. Si l'on retrouve son idée de tirage au sort pour nettoyer la politique, on retrouve aussi ses alliances controversés et son influence non négligeable dans un réel mouvement de politisation des déçus de la société. Certes, on pourra regretter l'absence de référence aux gilets jaunes, les scénaristes ayant visiblement préféré parler du fond ( la défiance du peuple envers les élus) plutôt que de la forme.
Passionné de politique française, j'ai particulièrement apprécié les petites références à nos divers hommes politiques. En ce qui concerne Vidal par exemple on trouvera clairement des clins d’œil au documentaire l'insoumis. Morel est stupéfiant de réalisme dans sa façon d'incarner Melenchon, les textes aident mais il n'est pas rare d'avoir l'impression de voir l'homme politique remplacer l'acteur. On pourra regretter l'absence de références claires à Emmanuel Macron et pourtant je trouve que c'est au contraire un excellent choix d'avoir ainsi brouillé le message. D'une part cela laisse plus de liberté aux scénaristes et d'autre part cela permet de traiter d'autres sujets. D'autant que le message n'est pas si brouillé que cela, la politique du président fictif fait écho à celle du président réel et on pourrait être surpris de leurs similitudes dans les mois à venir car le discours de fin de mandat du président de Baron Noir pourrait tout à fait nous être servi par le notre comme a pu le prouver son revirement du 12 mars 2020. (désolé pour le côté vague de ce passage mais je tenais à ne pas spoiler la série tant dans l'identité du président que dans ses actes)
Petit regret au niveau des personnages, le sous emploi d'Hurgo Kleber, un excellent acteur et un très bon personnage de la série qui se voit pour cette troisième saison relégué au second rang malgré une scène particulièrement forte.
Niveau réalisation, la série utilise efficacement une ficelle éculé mais redoutable : la discussion en mouvement. Ainsi, les épisodes ne sont qu'une successions de discussions et pourtant, celle-ci se déroulant toujours en mouvement dans des décors de qualité, le spectateur se trouve pris d'un véritable vertige qui le saisit jusqu’à la fin de chaque épisode. Les intrigues sont tellement riches et les manipulations nombreuses que le rythme en devient plus effréné qu'un Fast and Furious. 
On appréciera également le soin apporté pour reproduire le réel. Non seulement on retrouvera des mises en scènes de campagne au niveau des meetings et des divers intervention officielles mais surtout on retrouvera des journalistes politiques de premier plan (je parle de leur présence à l'antéen, pas de leur qualité de journalistes :D ) comme Edwy Plenel, Nathalie Saint-Cricq, Laurent Delahousse, etc.
Un petit mot sur la musique, c'est le fruit du travail de Evgueni et Sacha Galperine dont j'avais eu l'occasion de vous parler pour Grace à Dieu qui livre cette fois une partition beaucoup plus rythmée et très prenante que vous n'êtes pas prêt de vous sortir de la tête. Plus d'une fois je me suis retrouvé à écouter le générique de fin en entier le temps de redescendre de l'épisode.
Bien sûr, mieux vaut s'intéresser à la politique Française pour savourer toute la subtilité de cette série mais elle se révèle également une belle porte d'entrée pour s'intéresser vraiment à ce milieu dont trop de citoyens se sont distancié à cause de sa fausse complexité. Baron Noir nous rappelle que derrière les hommes, il y a des idées et que ces idées valent qu'on se battent pour elles. L'abandon et le désespoir sont notre ennemi à tous et c'est en continuant à lutter pour les idées que nous pourrons construire un monde meilleur malgré les hommes.
Je ne saurais que trop recommander le visionnage de cette série à tout le monde, non seulement elle prouve la qualité de nos auteurs et notre capacité réelle à produire de séries prestigieuses mais surtout elle donne à réfléchir sur notre société et sur l'importance de notre implication au quotidien. Certes, le système est imparfait et nous pousse à la passivité mais c'est d'y céder qui aggrave le problème jour après jour, chacun peut faire sa part, par exemple en allant voter.
En conclusion, si vous vous demandez pourquoi voter aujourd'hui et que vous n'avez pas le temps de regarder Baron Noir avant d'y aller, dites-vous juste que 1) Les municipales ont un impact direct sur vous car votre maire est le premier à pouvoir agir sur votre quotidien 2) Les municipales sont un indicateur forte pour les présidentielles et sont l'occasion d'envoyer un message de soutien ou au contraire de révolte à notre gouvernement. Ne pas aller voter, même si c'est par choix, c'est ne pas être comptabilisé et donc perdre sa voix. Privilégiez le vote blanc si vous ne voulez pas avoir à choisir entre un sandwich au caca et une poire à lavement (merci Southpark), mais manifestez vous.


Note Globale :


Saison 3 :


Conclusion :

Une série menée de main de maître qui n'a pas à rougir de la comparaison avec un House of cards et dont la saison 3 est brillante tant dans son écriture que dans son regard de notre actualité.

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