Alors que d'immondes pirates mettent en danger notre sacro-saint petit écran à coup de téléchargements illégaux, un homme, un surhomme que dis-je, se dresse seul pour défendre la ménagère de moins de quarante ans et les CSP+. Ce héros se nomme: El programator.
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vendredi 25 octobre 2019

Banlieusards

Je n'ai pas encore rendu ma carte UGC et pourtant c'est un nouveau film Netflix que je vais critiquer aujourd'hui. Il faut dire que je l'attendais depuis un moment mais laissez moi vous raconter tout ça.





Date de sortie 12 octobre 2019 sur Netflix
Durée : 1h 36min
Réalisation : Kery James, Leïla Sy
Casting : Kery James, Jammeh Diangana, Chloé Jouannet
Genre : Drame
Nationalité : Français

Synopsis :

L'histoire de trois frères de banlieue. Demba, l’aînée, caïd du coin qui a cédé à la pression de l'argent facile. Soulaymaan, le second, convaincu de pouvoir s'en sortir honnêtement par lui même et Noumouké, le petit dernier, perdu entre ces deux modèles et désormais en âge de faire des choix pour son avenir.

Critique :

Vous l'ignoriez surement mais parmi mes coupables passions, il y a Orelsan. J'adore le travail de ce rappeur, je me reconnais beaucoup dans ses textes et des morceaux comme "si facile" ou"inachevés" me permettent souvent de me botter le cul. Bref, Orelsan n'a rien à voir avec ce film mais il a featuré sur le morceau "A qui la faute" que je vous ai mis à la place de la bande annonce de Banlieusards et qui m'a permis de découvrir Kery James. Honnêtement, ce morceau a été une énorme claque et le rappeur en dit presque autant en 5 min de clip qu'en 1h30 de film. Donc si vous ne l'avez pas encore fait, écoutez ce morceau pendant que je vous parle du film.
L'histoire est assez classique, des jeunes de banlieue essayent de s'en sortir. Je n'irais pas jusqu’à dire qu'on l'a souvent vu, la banlieue est rarement (bien) traité en France, mais le thème est déclinable dans tous les milieux difficiles puisqu'il est ici question de la prédétermination : notre environnement conditionne-t-il ce qu'on doit devenir. Et là où le film devient intéressant c'est qu'en parallèle de la classique histoire de petit dealer, Kery James nous propose une réflexion sur la responsabilité de l'état quant au sort des Banlieue. Une réflexion passionnante et remarquablement écrite. (il est à noter que c'est un thème cher au rappeur, il avait même écrit une pièce sur le sujet avant de pouvoir monter le film) Et ce qui fait la force de Banlieusard c'est qu'on ne cède pas au pathos. Kery James n'est pas là pour dénoncer les méchants blancs et plaindre les gentils noirs, non il est là pour exposer au plus grand nombre la situation, pour faire réfléchir, pour faire réagir et c'est d'autant plus important que la société a beaucoup évolué ces derniers mois. Avec les gilets jaunes beaucoup de gens ont compris que ce qu'il se passait en banlieue n'était pas normal. Pas seulement au niveau de la criminalité mais aussi au niveau de la prise en charge de cette criminalité. On appréciera notamment les références à de multiples affaires de violences policières Adama Traoré, Amine Bentousi, etc. Des noms qu'on connait mal, des histoires qu'on connait peu. Mais Kery James a l'intelligence de ne pas insister, il cite à titre de témoignage, pour qu'on ne les oublie pas et pas pour appuyer un plaidoyer lourdingue. Non, le plaidoyer, puisqu'il y en a bien un, est au contraire écrit avec beaucoup de finesse et une grande maîtrise de la langue et de la culture française. Si vous avez encore un doute sur le fait que le rap serait une sous musique, je vous invite à vous plonger dans ce film.
Très clairement pour un premier film c'est un coup de maître. Certes on pourra regretter certains figurants qui joue un peu moins bien, ou certaines facilités mais ce sont des défauts très vite oublié au vu des qualités de l'ensemble.
Niveau réalisation, c'est classique mais efficace, on notera de beaux plans comme le premier mouvement de caméra du film. On appréciera que la réalisation ne cède pas à la glorification de la violence, la traitant au contraire avec beaucoup de recul.
Niveau musique, c'est un sans faute, loin du cliché de la banlieue et du rap bourrin, Kery James propose des flows variés et de grandes qualités et on termine avec son morceau "banlieusards" genèse de ce film.
Un petit mot sur le casting, à l'exception d'un petit caméo de Mathieu Kassovitz (souvenez-vous La Haine, le grand film sur les banlieues françaises, 1995) je ne connaissais aucun des acteurs. Beaucoup sont débutant et pourtant mis a part certains seconds rôles mineurs, ils sont tous très justes. Pour son premier rôle Jammeh Diangana qui incarne le rôle principal, est vraiment bon. Kery James est tout aussi crédible dans celui du grand frère rebelle.
Dans l'ensemble, Banlieusard est une excellente surprise, il est triste de constater qu'un film de cette qualité sur un sujet aussi important n'a pas pu sortir en salle. Nul doute qu'il trouvera son public sur la plateforme vidéo mais le message envoyé ici par l'industrie du cinéma n'est pas glorieux. Je vous recommande donc chaudement de découvrir ce film et moi je m'en vais découvrir les albums de Kery James.



Conclusion :

Pour un premier film c'est une belle réussite. Une oeuvre profondément humaine qui permet un regard rare sur la banlieue.


Bonus:

Je suis tombé sur ce documentaire où Kery James intervient. Les thématiques ne sont pas rigoureusement les mêmes que dans le film mais tout de même très proche, je ne peux donc que le recommander pour enrichir le sujet évoqué par le film.

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